Vestige du projet abandonné (je le met ici vu que je ne vois pas où le mettre d'autre)

- Dit, un jour, tu m'apprendra?

- De quoi?

- Bah à jouer à ton jeux, débilos!

La tête cachée dans son cou, je regarde ses doigts courir incessamment sur son clavier, ses mains se calmant de temps à autre pour cliquer sur sa souris ou attraper la bouteille de limonade qui traine sur son bureau.

- Hein? Euh, oui, oui...

J'aime beaucoup le regarder jouer, assise à moitié sur lui, ma main dans ses cheveux, son cœur à coté du mien. Il entre comme dans une bulle, et son regard se fait plus profond tandis qu'il se concentre sur les images qui bougent à l'écran. Il se met à froncer un peu les sourcils et ses doigts se mettent à frapper plus violemment sur le clavier.

- Creve, fils de pute!

Bam. Il doit avoir réussi son combat, car il se laisse retomber dans le fond du fauteuil avec un sourire satisfait. Il baisse les yeux vers moi et attrape quelques seconde mes lèvres

- Tu sait que jt'aime, toi?

Il ne le pense pas. Mais ce n'est pas grave, rares sont les moment ou il pense à autre chose qu'a son jeu, de toute façon, quand il est devant l'ordinateur. Il n'y est pas tout le temps, heureusement pour moi. Heureusement pour nous.

Pourtant, pour rien au monde je ne lui demanderais d’arrêter. Ou de faire plus attention à moi. Parce que je sais que sans ça, il ne serais rien.

Et il n'y a que quand ses yeux, rivés à l'écran, passent fréquemment d'une information à une autre, qu'il n'a plus l'air de souffrir. Ses iris vert, les pupilles dilatées au maximum, plus aucune émotion, positive ou négative, ne passant à travers son regard, il est intensément concentré.


Et sa partie finit, trop vite ou pas assez, il a gagné ou perdu, et je me suis endormie sur lui. Il me regarde, me voyant enfin, sourie, me soulève et va me déposer dans mon lit. Il remonte la couverture et m'embrasse sur le front. Il se sent un peu coupable d'avoir autant joué, il joue quand même beaucoup, et ne m'offre pas tant de temps que ça alors que nous habitons ensemble.
Il s'approche de la fenêtre, dehors le soleil se couche déjà. Il commence à faire aussi sombre dans la ville que dans notre appartement, et que dans son âme. Il sursaute quand j'arrive derrière lui, passant mes bas autours de sa taille, posant ma tête sur son épaule, suivant son regard.

- Tu ne dormais pas?

- Tu m'a réveillée.

Il sourie à demi.

- Tu le méritais.

Il glisse se mains sur les miennes, nouant ses doigts aux miens, retrouvant son air pensif et son regard profond. Profondément triste. Je le fait se retourner, pour plonger mes yeux dans les sien, sur le point de se remplir d'eau.

- Hey, tout va bien, je murmure doucement...

Il y a tant de douleur, de détresse, de peur, dans ces yeux que j'en suis déstabilisée. Je ne comprendrais jamais ce qui se passe dans l'âme de l'homme que j'aime, et pourtant je donnerais tout pour pouvoir, le temps d'un instant, souffrir à sa place, le libérer de cette noirceur qu'il voit en lui même. Il est tellement loin, des fois, que j'ai peur de l'avoir perdu.

Il cligne des yeux et une larme perle, que je m'empresse d’effacer d'un doigt. Je me met sur la pointe des pieds pour aller embrasser chacune de ses paupières et lui rappeler que, maintenant et pour toujours, je l'aime.

Il murmure mon nom en un sanglot, cet appel à l'aide codé qu'il n'arrive pas à exprimer, mais que ses yeux me hurlent à chaque seconde. Je voudrais tant pouvoir l'aider, l’empêcher de souffrir, mais je ne sait rien faire. Je ne peut que lui rappeler que je suis là et le serrer dans mes bras le plus fort possible. Le plus longtemps possible.


Et soudain tout disparais, la douleur, la profondeur, la vérité. Il se décroche de moi et me sourie, redevenant l'homme simple et sincère qu'il laisse voir à tout le monde.

- Tu a faim?

Il me prend la main et m’amène dans la cuisine, quasiment en gambadant, retrouvant d'un coup toute sa joie de vivre et sa bonne humeur. Je ne peut retenir un éclats de rire. Il me jette un regard en coin, heureux d'avoir réussi à me faire rire après tout. Ses yeux brillent de cet éclat de bonheur fugace qu'il a des fois, quand il ne se déteste plus, quand il ne se torture plus. Je donnerais tout pour qu'il le garde chaque seconde de chaque minutes de chaque heures du reste de sa vie. Parce que ce n'est qu'a ces moments là que j'ai l'impression qu'il est heureux. Et ça me rend heureuse. Même si, caché au plus profond de ses pupilles, le vert s’assombrit pour laisser place à un trou noir. Un trou que même le plus heureux des rires n'a jamais réussi à cacher.


L'homme de ma vie a 2 regards, un milliard de nuances dans chacun d'eux, et les plus beaux yeux de la planète, qu'ils soient sombres ou allumés. C'est pour cela qu'il est qui il est. Et c'est pour cela qu'il en souffre autant.