Voilà une petite nouvelle bien glauque... xD
Nous naissons vides, pauvres marionnettes de chair sans substance, inconsistantes; et toute notre vie durant nous cherchons chez les autres de quoi remplir ce manque.
Je me souviens de quand tu m'expliquais ça en souriant, nos yeux rêveurs tournés vers les étoiles et ma main bien au chaud dans la tienne. Ça me semble si récent et si lointain...
Je te regarde, te dévisage, mais ma vue se brouille. Des larmes? Je ne veux pas pleurer devant toi mais je crois que je ne contrôle plus mes glandes lacrymales. Je me sens glisser vers l'arrière.
Tu reste debout face à moi, me transperçant de ton regard glacial dont les reflets argentés jadis si chaleureux ne font qu'accentuer ma douleur. Tu reste debout et me regarde silencieusement, un vague sourire méprisant aux lèvres.
Nous cherchons à combler ce vide en nous remplissant des bribes des autres, filaments de rires partagés, morceaux de tendresse, ombres de mots chuchotés...
Je chute, comme au ralentit, je chute sur le sol glacé, encombré d'objets cassés qui n'ont plus d'utilité, vestiges d'un passé gommé par la guerre, souvenirs de quelque chose qui n'est plus... Comme moi bientôt.
Je te regarde, d'un air suppliant, tu me regarde, avec un sourire moqueur.
Et grâce à ce rembourrage fait d'autres, nous réussissons à tenir debout et à avancer...
Tu vas vraiment m'abandonner ici, au milieu de toutes ces choses brisées, oubliées par tous ? Toi, toi qui était là quand j'avais désespérément besoin de chaleur humaine, toi qui a écouté mon histoire avec attention et qui m'a promis de ne plus jamais me laisser en tête à tête avec l'angoissante solitude qui caractérise nos vies?
Bien sur que tu vas le faire.
D'ailleurs, tandis que je sens un froid glacial m'envahir, tu secoue la tête de droite à gauche. Lentement, avec un air navré mêlé de mépris.
Et toujours tes yeux, tes yeux argentés, fixés sur moi, toujours ces yeux plus froids que le froid qui m'étreint le cœur et le corps, plus froid que le froid du sol qui s'infiltre en moi.
Au ralentit, mes yeux papillonnent une dernière fois.
Au ralentit, tu me tourne le dos et disparaît dans les ténèbres.
Mon rembourrage a volé en éclats lorsque tu m'as enfoncé une lame dans le ventre.